Un conte à finir avec une équipe pour l'améliorer

         Lors de mon troisième stage, j'ai eu deux situations d'apprentissage et d'évaluation à réaliser, l'une dans le domaine des arts plastiques et l'autre dans celui de la langue française. Toutefois, c'est avec la mise en application du grand projet d'écriture que j'ai compris l'ampleur de l'impact que des projets de niveau peuvent avoir sur l'amélioration de celui-ci.

 

Extrait du conte produit / Image par : Valéry
Extrait du conte produit / Image par : Valéry

         Tout d'abord, j'ai préparé un croquis de mon projet d'écriture d'un récit narratif en trois temps avec un approximatif des délais nécessaires pour vivre chaque étape sans vraiment savoir encore si ce serait adéquat pour les élèves des groupes. Ainsi, j'ai pu le présenter à mon enseignante associée et à ma collègue de niveau et rectifier au besoin les détails qui semblaient moins réalistes dans le temps que l'on pouvait y allouer. En équipe de niveau, nous avons alors fait le choix de réaliser les étapes en différé en adoptant deux façons légèrement différentes de procédé. De cette façon, à tour de rôle, nous pouvions offrir des suggestions de quelques ajustements à faire sur la manière de vivre le processus selon les difficultés qui avaient été rencontrées. Au départ, nous déterminions en grand groupe les trois parties de la situation initiale, c'est-à-dire le «Qui?», le «Quand?» et le «Où?». Pour chacun des aspects, je prenais au moins trois suggestions avant de faire un vote secret où les élèves cachent leurs yeux pour voter afin d'influencer le moins possible leur vote par ceux des autres. La suggestion gagnante s'intégrait alors à notre conte. Dans une seconde séance, je reproduisis le premier processus de sélection pour faire le choix du développement de l'histoire, c'est-à-dire le déclencheur (Voulait...) et les péripéties (Mais...). Afin de ne pas perdre de vue notre histoire, je présentais la situation initiale que j'avais composée avec leurs choix.  Finalement, après leur avoir relu le début de l'histoire dont ils avaient choisi les éléments, les élèves devaient compléter la situation finale, c'est-à-dire le dénouement (Alors...) et le retour à la normale (Finalement...), individuellement.  Ma collègue a suivi le même processus à l'exception que même les phrases de l'histoire ont été composées par les élèves. Considérant que les élèves des deux groupes n'avaient pas les mêmes difficultés, nos rétroactions ont permis de déterminer des adaptations ainsi que du matériel de soutien pour les élèves en ayant le plus besoin comme des banques de mots, des moments de visualisation avant d'écrire ou des coquilles pour le son. Après une comparaison des processus, j'ai pu constater que les élèves avaient davantage tendance à relire le début de l'histoire, même si ce n'est pas à l'unanimité, quand les phrases sont construites par eux ou par un pair que si c'est l'adulte qui les a écrites. Il en est possiblement ainsi, car ces phrases leur sont plus accessibles syntaxiquement et plus compréhensibles dans leur processus d'écriture en plus d'être une motivation à réaliser la tâche. En ce qui a trait à l'évaluation des diverses compositions, nous avons opté pour une grille de critère d'évaluation qui avait été adapté les attentes de la deuxième année. Comme ajout à la production, j'ai été désireuse de transférer le projet sous le format d'un livre numérique avec Book Creator où nous pourrions entendre les élèves réciter les différentes fins du conte. Après avoir numérisé toutes les illustrations des élèves en les plaçant en ordre, nous réalisions en rotation des périodes d'enregistrement des élèves. Ces périodes étaient organisées de manière à permettre aux élèves de se pratiquer à quelques reprises avant de s'enregistrer sur la tablette. Nous avons profité la période de reprise en charge du groupe par mon enseignante associée pour réaliser cette étape. En effet, pendant nos périodes libres, nous avions la possibilité d'être deux pour le faire ce qui facilitait le processus tout en permettant d'en accélérer la réalisation étant donné la simultanéité d'un élève qui se pratique et d'un autre qui enregistre.

 

 

         Ensuite, j'étais désireuse de formuler de la rétroaction formative aux élèves pour les aider dans leur écriture sans trop savoir vraiment comment faire, car j'avais l'impression que de le faire bloquait certains élèves dans la poursuite de leur acte d'écriture. Dans l'objectif de conserver ces commentaires, j'ai choisi de les noter dans mon carnet d'observation sous leur nom ce qui, j'en suis bien consciente, était fort moins pertinent pour l'élève qui ne les a pas entendus. Toutefois, je pouvais m'inspirer de ces observations pour formuler des commentaires dans un cadre d'évaluation plus sommaire. En ce qui a trait à l'évaluation en soi, le choix de la grille d'évaluation est parfois difficile étant donné qu'il faut tenir compte de plusieurs aspects de la langue dans l'analyse et que certaines grilles peuvent être complexes à utiliser. De plus, nous avions un désir de cohérence de l'évaluation du projet d'écriture dans les deux classes.

 

 

         Dans une prochaine réalisation du projet, je tenterais de le faire à la manière de ma collègue, c'est-à-dire en faisant formuler les phrases de l'histoire par les élèves avec les suggestions qu'ils ont votées. Aussi, je ferais une période de remue-méninge pour construire avec eux une banque de mots composée d'adjectifs, de verbes et de noms. De plus, comme l'une des activités de préparation à l'écriture que l'on peut lire dans le livre J'écris des poésies - des poèmes à lire, des jeux pour en écrire (Causse, 2004), j'aimerais pouvoir construire un carnet d'écrivain avec les élèves dans lequel ils pourraient emmagasiner des mots et des expressions qu'ils aiment pour leur son ou leur sens. Ils auraient alors la possibilité de s'en servir comme inspiration. 

 

Et la recherche dans tout ça?

         Afin de mieux comprendre la distinction entre l'évaluation formative et sommative, j'ai tenté de faire quelques recherches pouvant m'aider à mieux choisir mes interventions dans les deux cadres. Tout d'abord, l'évaluation formative est censée être «[...] une évaluation qui se met au service de la régulation des apprentissages des élèves et d’une différenciation pédagogique au sein de la classe.» (Mottier Lopez, 2014, p. 88) Ainsi, les commentaires qui y sont formulés ont pour objectif de soutenir l'élève pour l'aider à se réajuster au cours du processus, lorsque nécessaire. Puis, l'évaluation sommative se trouve à être davantage un jugement final des acquis des élèves que ce soient au niveau de leurs compétences que de leurs connaissances. Cette évaluation se déroule généralement à la fin d'une étape comme celle de l'année, du cycle et même du primaire.

 

         De plus, dans l'expression «évaluation formative», on peut comprendre un processus de formation probablement plus explicite que ce que j'ai probablement offert à mes élèves. En effet, avec les élèves, nous avons observé différents contes et récits en les analysant dans un schéma en trois temps, sans réellement en venir à l'étape de réalisation du processus d'écriture d'une histoire. Selon Laroui, Morel et Leblanc (2014, p. 114), il serait plus bénéfique pour les apprentissages en écriture quand « les enseignants [...] enseignent explicitement et par application concrète les stratégies de reconnaissance de mots, le vocabulaire, l'orthographe, les stratégies de compréhension de textes ainsi que les processus d'écriture.» De ce fait et afin de m'assurer  à l'avenir d'une meilleure compréhension de l'écriture d'un récit en trois temps, j'essaierais d'y aller en étape d'autonomie, c'est-à-dire d'y aller graduellement de la modélisation à la pratique autonome en passant par la réalisation en groupe puis par la pratique guidée.

 

 

         Finalement, comme le dit Garcia-Debanc (1986, p. 29) cité dans Blain et Lafontaine (2010, p. 472), le «rédacteur doit gérer simultanément ces diverses opérations : il doit à la fois garder en mémoire ses idées, les relier d’une manière logique et respecter le code orthographique ou syntaxique. Il se trouve ainsi en état de surcharge cognitive. Cette surcharge cognitive est particulièrement critique chez les enfants.» Ainsi, principalement pour de si jeunes scripteurs qu'étaient mes élèves de fin de premier cycle, les étapes de préparation auraient pu grandement aider les élèves à se concentrer sur certains processus à la fois. De cette façon, les élèves auraient d'abord dirigé leur concentration vers la construction des idées et de la logique du texte sans tenir compte, pour le moment, à l'aspect orthographique de la langue. Il aurait alors pu y avoir un processus de révision, avec ou sans les pairs, où les élèves auraient pu relire à voix haute leur texte et réajuster leurs idées au besoin. Dans tout le processus, c'est possiblement le moment qui aurait été le plus propice à recevoir une évaluation formative avec des commentaires provenant autant de l'adulte que d'un pair. Puis, c'est une fois qu'ils sont satisfaits de leur production que ces apprentis-scripteurs seraient passés à travers le processus de correction.

 

 


Références

Blain, S. et Lafontaine, L. (2010). Mettre les pairs à contribution lors du processus d'écriture : une analyse de l'impact du groupe de révision rédactionnelle chez les élèves québécois et néo-brunswickois. Revue des sciences de l'éducation, 36 (2). doi : 10.7202/044486ar. p. 469-491. Récupéré de : http://www.erudit.org/revue/rse/2010/v36/n2/044486ar.pdf

 

Causse, R. et Claverie, J. (2004). J'écris des poésies - des poèmes à lire, des jeux pour en écrire. Albin Michel Jeunesse : Humour en mots, France. ISBN: 9782226129987. 38 p.

 

Garcia-Debanc, C. (1986). Intérêt des modèles du processus rédactionnel pour une pédagogie de l’écriture. Pratiques, 49. p. 23-49. ISSN : 0338-2389.

 

 

Laroui, R., Morel, M. et Leblanc, S. (2014). Des pratiques pédagogiques de l'enseignement du lire/écrire, déclarées par des enseignantes du primaire. Phronesis, 3 (1-2). doi : 10.7202/1024594ar. p. 111-120. Récupéré de : http://www.erudit.org/revue/phro/2014/v3/n1-2/1024594ar.pdf

 

Mottier Lopez, L. (2014). L'évaluation pédagogique va-t-elle enfin marcher sur ses deux pieds? Les enseignements de l'histoire récente de l'école primaire genevoise. Éducation et francophonie, 42 (3). doi : 10.7202/1027407ar. p. 85 - 101. Récupéré de : http://www.erudit.org/revue/ef/2014/v42/n3/1027407ar.pdf


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